En Seine-Maritime avec Lionel, l'ancien SDF, de la rue à la... crèche !
FAITS DE VIE
Avec Philippe Bertin 25 Décembre 2021 • 14 min
Il était pouilleux, crasseux, "un vrai clochard". Lionel a remonté la pente. Sa crèche de Noël pour les gens de la rue en est le symbole. Il y a dans son petit appartement un joli sapin de Noël, une guirlande qui court et clignote le long des murs et puis, sur une minuscule étagère, quelques photos. Elles comptent beaucoup. Côte à... côte, l'image du pape François, un cliché d'une de ses amies aujourd'hui décédée et une carte postale de Sainte Thérèse de Lisieux. Tout à côté, une petite croix et la Bible. "Je la lis chaque jour." Il a aussi glissé dans un classeur bleu les petits mots envoyés par des enfants du collège Sainte-Marie, tout proche. Tous lui disent merci "du fond du cœur". Lionel Droniou, 64 ans, dit " Yoyo", né un 1er avril dans un village de Seine Maritime, mis à la porte de la maison familiale par sa mère et son beau-père et élevé par sa grand-mère, est venu leur raconter son parcours de vie. Et sa vie à lui fut sacrément cabossée : il l'a passée dans la rue pendant un paquet d'années, entre Rouen et Le Havre "J'étais un vrai clochard, un pouilleux, un crasseux, avec mes cheveux longs et une barbe qui me tombait jusqu'aux genoux. je passais mon temps à faire la manche et à picoler." Il se souvient qu'une nuit de 2005, sous le porche du lycée de la Miséricorde, à Rouen, où il avait pris l'habitude de dormir aux côtés de son copain Pascal, un autre SDF, il s'est réveillé en sursaut, les mains toutes tremblantes, il s'est assis sur sa couverture et a attendu que le jour se lève. Au petit matin, il a vu des gens passer sur le trottoir d'en face. "C'est là, dit Lionel, que tout a changé. Je me suis dit : 'et moi, pourquoi je ne ferai pas comme eux ?'". C'est-à-dire ? "Redevenir quelqu'un de normal, aller boire un petit café au bistrot du coin, aller chercher son pain à la boulangerie... C'est à ce moment-là que j'ai décidé de venir au foyer." Arlette, de l'association "Le Lien", qui vient en aide aux gens de la rue, l'a aidé à en trouver le chemin. "Aujourd'hui, vous pouvez lui parler de Yoyo : elle est fière de moi." Quinze ans plus tard, le foyer de l'URAS à Rouen, qu'anime l'association d'action sociale Emergence-s, est devenu sa seconde maison. Il y loge dans une annexe, s'est reconstruit pas à pas, sans plus jamais d'alcool, aidé par les animateurs du lieu dont Hafid, son confident et encadrant. "Sans lui, sans eux, je n'aurais pas réussi." "Faits de vie", un podcast de Philippe Bertin Podcast by Tendance Ouest Lire la suite